On becoming a god in Central Florida, et le match des troisièmes saisons
Les effets de la crise du Covid commencent à se faire sentir, avec moins de nouveautés ces dernières semaines. C'est le moment pour revenir sur plusieurs séries que vous avez peut-être négligées.
On becoming a God in central Florida (Showtime)
La Floride, son atmosphère poisseuse, ses crocodiles et ses palmiers, est depuis plusieurs années le décor de nombre de séries plus ou moins intéressantes, de Dexter à Bloodline, qui tendent sérieusement à prouver que la misère n’est pas forcément plus belle au soleil. Krystal, l’héroïne de On becoming a God in central Florida (formidable Kirsten Dunst), est une ancienne reine de beauté qui travaille dans un parc aquatique à seulement 5 minutes de Disneyworld. Son mari sillonne la Floride pour vendre des produits FAM, et se tue (littéralement à la tâche). Contrainte, pour joindre les deux bouts, de reprendre l’activité de son époux, Krystal découvre vite qu’il s’agit d’une arnaque pyramidale dirigée par le diabolique Obie Garbeau II, gourou sans scrupule de la FAM family.

Sur fond de jean neige et de lamé, On becoming a God in central Florida a beau se passer au début des années 90, elle n’en est pas moins une féroce satire de l’Amérique contemporaine, de son appétit démentiel qui dévore les petites gens que sont Krystal ou ses voisins incarnés par Mel Rodriguez et Beth Ditto (oui, la chanteuse de Gossip, méconnaissable en gentille voisine pas si naïve). Pourtant, c’est à leur revanche qu’on assiste ici : maligne, Krystal s’adjoint les services d’un collaborateur de son mari, Cody, héritier raté qui se rêve en businessman grâce aux combines d’Obie Garbeau. C’est souvent drôle malgré un ventre mou en mi-saison (10 épisodes tout de même, 8 auraient suffi). Une deuxième saison est en route, en attendant peut-être une diffusion française.
Le match des troisièmes saisons : The Good Fight, Killing Eve et The Marvelous Mrs Maisel
Qu’ont en commun une avocate de Chicago, une tueuse à gages internationale et une comédienne de stand up dans le New York de la fin des années 50 ? Détermination, fabuleuses garde robes et troisième saison ! Evidemment, spoilers à venir.
The Good Fight (Amazon)
Si Michelle et Robert King, les créateurs de la série, sont à l’avant-garde de l’offensive anti-Trump depuis la première saison de ce spin off de The Good Wife , cette troisième saison nous pose constamment la question machiavelienne : la fin justifie-t’elle les moyens ? Après deux saisons à contempler impuissante l’effondrement de l’Amérique démocrate, Diane rejoint un groupe d’activistes, et se posent à elle nombre de dilemmes moraux. Faut-il adopter les méthodes de l’ennemi pour le défaire ? C’est ce que nous demande la série, sans jamais opter pour une réponse définitive. Les enjeux sont toujours aussi importants dans cette troisième saison, qu’il s’agisse de se dépatouiller avec l’héritage controversé d’un avocat, figure de la lutte pour les droits civiques et agresseur sexuel, ou de poser la question de la grande complaisance des Gafam face à la censure du régime chinois. Et cette troisième saison se paye le luxe d’être pédagogue et drôle avec ses petites pastilles animées et chantées, « The good fight short ».

Killing Eve (Canal +)
Peu de séries ont les nerfs de défier les conventions scénaristiques avec autant de panache que Killing Eve, qui n’hésite pas à faire mourir un de ses personnages principaux dès l’ouverture de cette nouvelle saison. Hélas, si cette saison choque souvent, dans la veine comique qui est la sienne, elle trouble beaucoup moins qu’avant. Il faut dire qu’il est compliqué de se tirer du cul-de-sac de la deuxième saison, où Villanelle tentait d’assassiner Eve, pourtant objet de son obsession depuis le début. On le comprend, Eve est marquée psychologiquement, et on retrouve notre espionne qui fait des gyozas au fond de la cuisine d’un restaurant de Londres. Villanelle est elle hors de contrôle, devient brouillonne, au point que l’organisation pour laquelle elle travaille, The Twelve, lui assigne une tutelle en la personne de Dasha (Harriet Walter, le vrai ressort comique de cette saison, tout en survêtement peau de pêche). C’est bien sûr toujours divertissant, mais moins brillant que la première saison, la faute à un changement de showrunner à chaque saison, une volonté de sa créatrice, Phoebe Waller-Bridge, qui nuit à la cohérence de la série. Une quatrième saison a été commandée.
The marvelous Mrs Maisel (Amazon)
Le monde merveilleux de Mrs Maisel, femme au foyer new yorkaise devenue comédienne de stand up dans les années 50, est toujours aussi merveilleux dans cette saison 3, et ce alors qu’autour de l’héroïne, le monde change à vitesse grand V. Evidemment, il est réconfortant de retrouver le défilé de tenues toutes plus élégantes de Midge, son irrésistible abattage et le drôle de duo qu’elle forme avec sa manageuse, Susie. C’est aussi le moment de voir sa carrière naissante décoller, alors qu’elle fait la première partie du chanteur noir (et gay, ce qu’on découvre en cours de saison), Shy Baldwin. Alors que ses parents ont tout perdu, les obligeant à vivre avec les parents de Joel, l’ex-mari toujours très présent, que Susie a été prise par le démon du jeu et perdu l’intégralité des cachets de Midge, que l’étau d’une société américaine raciste et homophobe se resserre autour de son ami Shy Baldwin, Midge poursuit son bonhomme de chemin en robe Givenchy et escarpins assortis. C’est un poil lassant. Il est vrai aussi qu’en ce moment on peut avoir envie de s’évader dans le fantasme d’une série où rien n’est jamais grave. On peut aussi penser que la quatrième saison sera pour Midge celle de la prise en conscience, en témoigne ce dernier épisode où elle apprend que l’humour peut avoir des conséquences sur des personnes moins privilégiées qu’elle.
Un peu plus de lecture
Alors que les tournages commencent à reprendre peu à peu, à quoi peut-on s’attendre ? Indices : beaucoup d’effets spéciaux, des temps de tournages ramassés, et des biodomes (en anglais)
Mini-série ou long film ? On est en droit de se poser la question quand on évoque certaines adaptations comme Little fires everywhere, ou l’Agent immobilier diffusé récemment sur Arte.
Curiosité : avant le pilote que nous avons tous aimé et qui nous a lancé dans une frénésie de fantasy, le premier épisode de Game of Thrones a connu une version bêta absolument catastrophique.